Le billet de Mado Venet: , concert Les CLASSIQUES du PRIEURE Dimitri et Julien Bouclier





Encore un très beau programme pour le dernier concert de la saison 2018 des Classiques du Prieuré avec les incomparables frères Bouclier déjà bien connus du public chambérien.
Introduction avec un Prélude de César Franck, suivi d’un extrait d’Orphée et Euridice de Glück.
C’est le compositeur russe Sémionov qui nous dévoile la vie vers l’au-delà : Kalina Krasnaja, pièce vraiment très émouvante ; L’accordéon de Dimitri Bouclier et le violon de Julien Bouclier font merveille dans cette interprétation.
Voilà ensuite un compositeur ukrainien , spécialiste de l’ accordéon de concert, Vladislav Zolotarev avec son Rondo Capriccioso. Rien de léger comme pourrait laisser paraître le titre de cette œuvre très riche. On y reconnaît des allusions à la musique religieuse pour les morts: un Diès Irae saccadé, étonnant tant il traduit l’angoisse profonde.
Élève de Nadia Boulanger, l’Argentin Astor Piazzola, comme on l’a beaucoup dit, a renouvelé l’art du tango. C’est sur les rives de la Méditerranée qu’il est allé chercher l’inspiration dans ses racines italiennes pour ce « Méditango » . Solo d’accordéon que Dimitri Bouclier a bien su faire revivre.
Le compositeur russe V Vlasov a lu attentivement Soljenitsine. Il écrit « Goulag » partition pour accordéon en cinq mouvements qui retracent les journées des prisonniers. La pièce commence par des rafales de vent, allant crescendo, ce qui donne tout de suite l’ambiance. Quel instrument autre que l’ accordéon peut réaliser ces déplacements d’air sonores sans aucune ligne mélodique ? C’est tout à fait prenant et donne envie de s’abriter. L’enchaînement se fait avec le bruit rythmé du train qui achemine les hommes au travail. Difficile de raconter la suite avec ses cris à la mort. C’est une œuvre magistrale, imposante et bouleversante. L’interprétation de Dimitri Bouclier pénètre cette apocalypse qui détruit tout. Il nous en dit beaucoup plus que tous les reportages déjà vus ; la révolte aboutira-t’elle ?
Nos artistes ont bien compris qu’après cela le public a besoin de respirer un air plus serein.
Et c’est Tchaïkovsky qui nous l’offre ; Il s’était retiré sur les bords du Lac Léman pour écrire dans la paix son concerto pour violon et c’est le 2ème mouvement appelé « Canzonnetta » que Julien Bouclier nous donne ce soir avec beaucoup de sensibilité et de maîtrise pour s’imposer à l’auditoire après l’écoute du Goulag !
Nous entendons Galliano avec un hommage à Nougaro, ‘l’Hiver (le cher hiver) de Chalaïev.
La soirée se termine avec les réminiscences de Brel dans l’enthousiasme général.


Mado Venet


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